Mais qui va garder les enfants ? (en télétravail)

Dans son allocution, le Président de la République a annoncé qu’à compter de ce vendredi les crèches, écoles, collèges et lycées allaient fermer.  Les parents vont donc devoir garder leurs enfants.

Emmanuel Macron semble cependant avoir conditionné le bénéfice de l’activité partielle aux seuls parents qui justifieraient de l’impossibilité de télétravailler tout en gardant les enfants. Panique et incompréhension alors que de nombreux parents considèrent que la présence d’enfants au domicile est un obstacle dirimant au télétravail.

Remontons le fil de l’histoire : en raison de la crise sanitaire, une partie des salariés a été placée en arrêt maladie « dérogatoire », lorsqu’ils devaient garder leur enfant de moins de 16 ans en raison de la fermeture des établissements scolaires.

Ces salariés, alors qu’ils n’étaient pas malades, ont pu bénéficier des indemnités journalières de sécurité sociale ainsi que du complément d’indemnisation versé par l’employeur prévu par l’article L. 1226-1 du code du travail jusqu’au 1er mai 2020.

La situation de ces salariés a été modifiée à compter du 1er mai 2020. En effet, la deuxième loi de finances rectificative pour 2020 du 25 avril 2020, publiée au Journal officiel du 26 avril, a prévu la fin de ces arrêts de travail dérogatoires à compter du 1er mai. Les salariés concernés ne sont donc plus indemnisés par l’Assurance maladie. S’ils ne peuvent toujours pas exercer leur activité professionnelle, notamment en l’absence de télétravail, leur employeur devait les placer dans le dispositif d’activité partielle.

L’ordonnance n° 2020-1639 du 21 décembre a reporté  la date de fin de ce dispositif, prévue initialement au 30 décembre 2020, à une date qui doit être fixée par décret et au plus tard au 31 décembre 2021.

C’est ainsi que dans sa dernière version applicable à ce jour, l’article 20 de loi de finances rectificative pour 2020 (n° 2020-473 du 25 avril 2020) dispose :

« Sont placés en position d’activité partielle les salariés de droit privé se trouvant dans l’impossibilité de continuer à travailler pour l’un des motifs suivants (…) le salarié est parent d’un enfant de moins de seize ans ou d’une personne en situation de handicap faisant l’objet d’une mesure d’isolement, d’éviction ou de maintien à domicile ».

Il résulte des dispositions précitées que le seul fait de devoir garder un enfant de moins de seize ans à la suite de la fermeture de son établissement scolaire constitue un motif sui generis pour bénéficier du dispositif d’activité partielle.

Les déclarations d’Emmanuel Macron ont toutefois semé le doute : et si les parents devaient désormais justifier du fait que garder ses enfants au domicile rendait le télétravail impossible ?

Notamment par le biais d’un « tweet » la ministre du Travail, Élisabeth Borne, a rassuré les parents anxieux : dans tous les cas, il sera possible à l’un des parents de demander à l’employeur d’être placé en arrêt de travail pour s’occuper des enfants.

Le salarié devra remettre à son employeur une attestation sur l’honneur indiquant qu’il est le seul des deux parents demandant à bénéficier de l’activité partielle au motif de la garde d’enfant. Les salariés bénéficieront alors d’une indemnisation à hauteur de 84% de leur rémunération nette ou de 100% pour les salariés au SMIC, avec zéro reste à charge pour les employeurs.

À contrario, les parents téméraires qui souhaiteraient travailler et garder leurs enfants pourront bien évidemment le faire.

La question d’un ancien ministre demeure : mais qui va garder les enfants ?

Me Julien ASTRUC

Avocat spécialiste en droit du travail

Montpellier